Culture mondaine et littérature

Le public mondain érige au titre de critère d’évaluation majeur des œuvres le plaisir qu’elles procurent. Cette orientation entraîne des répercussions directe sur la production et la consommation de la littérature. Plaire aux lecteurs et aux spectateurs présuppose la mise en oeuvre de stratégies de séduction élaborées. Ainsi le plaisir est fonction de la proximité que le texte est susceptible d’instaurer avec son lecteur. L’œuvre se doit donc de faire écho aux préoccupations, aux connaissances et au mode de vie du lectorat, de telle sorte que la connivence que l’auteur est capable d’instaurer par ce moyen conditionne assez nettement le plaisir procuré à la lecture. Selon la logique de consommation et d’évaluation mondaines, il est essentiel d’assimiler la culture de son temps et de la restituer dans ses aspects superficiels comme dans ses préoccupations profondes. Cette logique est résumée par La Rochefoucauld dans ses Réflexions diverses : « Pour plaire aux autres il faut parler de ce qu’ils aiment et de ce qui les touche. »

Ce qui fonde le plus sûrement l’« agrément » d’un texte est dès lors la mise en circulation de figures et d’idées à la mode. La proximité est ainsi garantie et, au plaisir de la connivence, s’ajoutent l’émulation intellectuelle et la fierté de la reconnaissance d’éléments culturels communs.

Du rôle de la connivence

La connivence est, de fait, une clé de compréhension essentielle du dialogue des œuvres mondaines avec leur public. Elle procure un plaisir fondé sur la reconnaissance de ce qui est familier — l’originalité n’est pas valorisée — et sur le désir d’être « touché » par les contenus proposés. De plus, évoluer dans les cercles mondains demande d’incessants efforts de présentation et de mise en scène de soi. Il faut plaire, briller, se révéler digne de son appartenance, sans jamais démériter. Dès lors, posséder les valeurs et les codes, toujours implicites, revendiqués mais non objectivés, est un moyen essentiel de pénétrer et de se maintenir au sein de tels milieux.

Saisis dans cette logique, les idées et les motifs à la mode offrent une possibilité de confirmer que l’on possède une connaissance et une imprégnation de la culture de référence. De même, retrouver dans un texte certaines de ses préoccupations, c’est s’assurer que l’on partage celles de son cercle. La grande importance allouée à la mise en circulation de valeurs communes s’explique ainsi aisément. Pour ces individus sans cesse en quête de confirmation — à soi et aux autres — de leur appartenance à un milieu élitiste dont les normes et les codes sont discriminants, on comprend l’importance de la mise en œuvre de référents culturels communs — comme autant de signes — dans les productions contemporaines. Le plaisir de la connivence est celui d’une confirmation d’appartenance sociale, de réassurance - en somme, de soulagement.

[Liste récapitulative des fiches]